9 astuces pour gérer le froid durant un voyage dans le Grand Nord
Indice UV, heures d’exposition, danger de la réverbération, on est bien informés quand il s’agit de se dorer la pilule mais quand on parle de destination où la température maximale ne dépasse pas le zéro, là, c’est une autre histoire. Parce que vivre 24h/24 dans un environnement plus froid que son congélateur ne s’improvise pas, voici quelques astuces et infos à retenir pour mieux appréhender un séjour en zone glaciale.
En milieu arctique, le meilleur instrument pour gérer le froid, c’est nous. Notre corps, et sa température naturelle, sert de chauffage ambiant. Autrement dit, nous sommes notre propre système énergétique durant le séjour. Il est primordial de bien en prendre soin. Parce qu’il n’y a pas de miracle, on ne peut pas survivre en milieu polaire sans chaleur.
La chaudière toujours, tu activeras
Pour que notre corps diffuse de la chaleur, il faut l’activer. Et pour l’activer, rien de plus simple que bouger. Hormis la nuit, parce qu’il faut bien se reposer, il est donc primordial de rester le maximum en mouvement. Durant notre trip au Spitzberg, le démontage des tentes personnelles et collective suffisait amplement pour notre activité matinale. La journée allait sans dire pallier à tous les besoins de réchauffement avec notre bonne douzaine de kilomètres quotidiens. Nos pauses déjeuner étaient d’ailleurs réduites à leur plus simple expression : une vingtaine de minutes, le temps de laisser souffler un peu les muscles et le rythme cardiaque, prendre le temps de se sustenter et essayer de profiter de ce bref moment de repos. Et le soir, rebelote, installation du camp. De quoi gérer le froid comme des maîtres !
Des vêtements techniques, tu porteras
Tino Rossi conseillait au Père Noël : « il faudra bien te couvrir ». Alors si le super bonhomme rouge, qui fait le tour de la planète par des températures loin d’être clémentes, se doit de faire attention à sa tenue, comment pourriez-vous ne pas en tenir compte ? Prenez donc le plus grand soin dans le choix de vos vêtements techniques et pour gérer le froid, n’oubliez pas le principe des trois couches. L’idée est de maintenir une température confortable à l’intérieur et de se protéger des intempéries extérieures. La première couche a pour but de dégager au maximum la sueur de la peau afin d’éviter la sensation de froid lors de son évaporation. La seconde sert à maintenir une température corporelle constante par conditions froides. Et la dernière, la plus technique, consiste en un vêtement imperméable.
Le nombre de calories, tu ne compteras pas
Un raid en région arctique n’est pas le lieu où il est adéquat de se poser des questions sur le nombre de calories emmagasinées. Parce que la chaudière qui ne cesse de fonctionner à un grand besoin d’être alimentée. Un petit-déj ultra-mueslisé est indispensable, des repas lyophilisés performants et goûteux (ça fait du bien au moral), essentiels. Sans oublier les innombrables en-cas qui viennent ponctuer sans parcimonie, une journée d’effort. Pour une fois qu’on peut manger autant qu’on veut du gras, du salé, du sucré, on va pas se plaindre, non ? Et même avec tout ça, votre bilan pondéral devrait être négatif. Je dis « devrait » parce que me concernant il n’a pas bougé d’un iota. Un excès d’en-cas ? Un dérèglement de chaudière ? Non, bien mieux, un transfert de masse graisseuse en masse musculaire !
Maintenant que vous m’avez lue jusqu’ici pour apprendre les bonnes bases d’attentions corporelles, je vais pouvoir passer aux choses sérieuses et vous alertez sur les supplices auxquels ce corps va être mis à l’épreuve. Ne partez pas…
Une eau inhabituelle, tu boiras
L’eau, pilier incontournable du trek ! Elle apporte bien sûr l’hydratation vitale mais c’est aussi l’activité principale du camp car cette demoiselle, omniprésente autour des randonneurs polaires, l’est sous forme de glace. Il faut donc passer de nombreuses heures devant les réchauds, à alimenter les gamelles en bloc de neige et à remplir les thermos. Très honnêtement, même si il faut de la patience, ce n’est pas la corvée la plus désagréable. Rester autour du feu par -25° a rarement dérangé quelqu’un. Au-delà de l’activité ludique, l’eau réserve une autre surprise… La glace fondue a la particularité de ne pas contenir de minéraux et si des carences peuvent se faire sentir après plusieurs jours, c’est surtout son effet « fluidifiant » qui est généralement remarqué par les trekkeurs. La tourista polaire en quelque sorte.
De toilettes avec vue, tu profiteras
On n’y pense pas de prime abord mais le sujet scatologique vient très vite sur la table pour ceux qui vont passer plus de 10 jours en pleine nature par des températures frôlant les -30°. Instinctivement, on apprend à réduire les allées et venues, même ceux qui sont super potes avec les toilettes y réfléchissent. On trouve aussi toujours un motivé pour creuser des toilettes dignes de ce nom. On a eu écho d’un architecte qui se faisait un plaisir d’en faire un œuvre journalière. De notre côté, on s’est contenté de beaux trous bien protégés par des murs de glaces, non pour éviter d’être vu mais pour éviter d’être mordu par le vent gelé. Je me souviens d’un de ces édifices dont le quatrième pan plus bas délivrait une splendide vue sur la banquise. De quoi rendre l’instant magique, non ?
Jamais une soupe à bonne température, tu ne dégusteras
Alors qu’il fait -15° dehors, que vous venez de faire trois heures d’effort matinal, que vous vous accordez une pause déjeuner rapide et qu’après, à peine, 10 minutes vous vous sentez déjà gelée, vous n’aspirez qu’à une chose : une bonne soupe bien chaude. Mais voilà, vous ouvrez votre thermos dans lequel l’eau est toujours bouillante, vous la servez dans le tupperware qui vous sert d’assiette, vous refermez le thermos, vous remuez le sachet de soupe dans l’eau et vous vous apprêtez à souffler dessus pour la rendre buvable. Souffler ? Mais pourquoi faire, les quelques minutes entre le versement et le remuage on suffit à rendre votre soupe tiédasse. Et vous aurez beau tenter des techniques de remplissage multiples pendant 12 jours, rien à faire, votre soupe sera trop chaude ou trop froide ! Autant vous y préparer.
Encore là ?! Vous êtes inscrits sur un prochain départ ou quoi ?! Si vous avez tenu jusqu’ici, vous méritez bien quelques tuyaux pour mieux vivre votre expérience du froid.
Au pressing solaire, tu passeras
Partir en autonomie, traînant son chargement nécessite une optimisation du poids. Pas question de jouer les « posh », personne ne sera là ni pour tirer à votre place, ni pour admirer vos tenues. Votre garde-robe sera réduite à son strict minimum. Comment la protéger des catastrophes ? Quand agripper une bouilloire, verser l’eau dans les sachets de lyophilisés et manger avec des moufles relève du challenge, comment éviter un nombre de tâches incalculables. Vous ne pourrez pas mais surprise, en tombant les aliments gèlent immédiatement. Il ne reste plus qu’à balayer le tout d’un revers de moufle. Tout beau, tout propre. Ça marche aussi sur la transpiration. En laissant sécher à l’air glacial les duvets et autres fringues, nous n’avions plus qu’à les secouer pour faire tomber la sueur transformée en glace.
Sous les aisselles, le fromage tu mettras
Si la glaciation instantanée des tâches est une aubaine, elle le devient beaucoup moins quand il s’agit d’alimentation ou de tout autre élément contenant de l’eau. Même si j’aurais pu m’en douter et y réfléchir au préalable, c’est par une expérience hygénico-gustative que j’ai rentré cette donnée dans ma petite tête. Obnubilée par la portion de camembert de notre ration du jour, je salivais déjà lorsque nous avons fait la pause. A peine le saucisson enfourné, j’attrapais le petit morceau emballé, l’ouvrais et me cassais une dent dessus. Il était tout simplement gelé. La séance dégustation a dû être remise au lendemain lorsque j’ai eu pensé à mettre à proximité de mon corps en chaleur sous l’activité mon petit triangle crémeux. Du coup, j’y ai calé en même temps mes lingettes d’appoint.
Le trou de froid tu creuseras
Le dernier conseil que je vous donnerai dans cet article est loin d’être le plus inutile. Pourtant quand notre guide nous a demandé de creuser un espace à l’entrée de notre tente et de rien n’y entreposer, on l’a regardé de travers. Il plaisantait ? On avait eu notre dose pour la journée. Alors pourquoi s’infliger le creusement d’un trou, dangereux qui plus est, piège pour les maladroites comme moi qui, à coup sûr, allaient tomber dedans en allant se coucher ? Cela m’a paru bien moins incongru le lendemain matin quand j’ai mis le nez dehors, juste au-dessus de cette poche de froid, encore plus glaciale, aussi dur soit-il à imaginer, que l’intérieur de notre tente. Ne vous a-t-on jamais dit « la chaleur monte. » Avec ma vision de novice des zones polaires, c’est comme ça que je résumerai l’effet de ce trou pas si futile que ça.